L’article 57 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle prévoit une simplification de la procédure en changement de nom.
Le texte dispose que :
« I.-La section 2 du chapitre II du titre II du livre Ier du même code est ainsi modifiée :
1° Après l'article 61-3, il est inséré un article 61-3-1 ainsi rédigé :
« Art. 61 3-1.-Toute personne qui justifie d’un nom inscrit sur le registre de l’état civil d’un autre Etat peut demander à l'officier de l'état civil dépositaire de son acte de naissance établi en France son changement de nom en vue de porter le nom acquis dans cet autre Etat. Lorsque la personne est mineure, la déclaration est effectuée conjointement par les deux parents exerçant l'autorité parentale ou par le parent exerçant seul l'autorité parentale, avec son consentement personnel si elle a plus de treize ans.
« Le changement de nom est autorisé par l'officier de l'état civil, qui le consigne dans le registre de naissance en cours.
« En cas de difficultés, l'officier de l'état civil saisit le procureur de la République, qui peut s'opposer à la demande. En ce cas, l'intéressé en est avisé.
« Saisi dans les mêmes conditions, le procureur de la République du lieu de naissance peut ordonner lui-même le changement de nom.
« Le changement de nom acquis dans les conditions fixées aux quatre premiers alinéas s'étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire lorsqu'ils ont moins de treize ans. » » ;
2° L'article 61-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « de son conjoint », sont insérés les mots : «, de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité » ;
b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« De même, les décisions de changement de prénoms et de nom régulièrement acquises à l'étranger sont portées en marge des actes de l'état civil sur instructions du procureur de la République. » ;
L’article 114 VI de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle précise que « Le I de l'article 56 ainsi que le 1° du I et le III de l'article 57 ne sont pas applicables aux affaires en cours ».
L’entrée en vigueur des dispositions nouvelles de la loi « J.21 »
La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a été publiée au Journal officiel de la République Française n° 0269 du 19 novembre 2016. L’article 1er alinéa 1er du code civil dispose que : « Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française [JORF], les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ».
Elle s’applique donc le lendemain de sa publication (JORF n°0269 du 19 novembre 2016 - texte n° 1), soit dès le 20 novembre 2016.
La nouvelle procédure de l’article 61-3-1 du code civil n’est pas applicable pour les affaires en cours et dont est actuellement saisie la Direction des affaires civiles et du Sceau (DACS).
Ce n’est qu’en cas de demandes nouvelles des intéressés que la procédure « simplifiée » pourra être mise en œuvre
La simplification « partielle » de la procédure de changement de nom : la différence de nom interétatique (cas des binationaux)
D’emblée, il convient de préciser que ces nouvelles dispositions concernent uniquement le contentieux relatif au changement de nom interétatique. L’intéressé doit être binational et déjà bénéficier d'une décision administrative ou judiciaire d'un État étranger de changement de nom.
C’est le cas lorsque l’intéressé est titulaire de deux état-civils différents (Ex. Monsieur s’appelle X. en France, mais Y. en Allemagne).
Cette divergence d’état civil n’est pas sans poser de problèmes. Le demandeur peut éprouver des difficultés pour obtenir des documents d’identité, le cas échéant pour ses descendants (carte nationale d’identité, passeport, livret de famille etc.) ou avoir accès à des prestations sociales (retraite, etc.). On peut supposer que cette nouvelle procédure permettra de pallier celles-ci, où à tout le moins en faciliter les démarches (Sur la nécessité d’un même nom de famille pour le ressortissant de chaque État membre - CJCE, Garcia Avello, 2 octobre 2003, C-148/02 ; CJCE, Grunkin et Paul, 14 octobre 2008, C 353/06)
Ces problèmes sont d’autant plus importants lorsqu’une demande de transcription d’un acte de naissance ou de mariage est aussi engagée.
La procédure est simplifiée en la matière, puisque l’intéressé n’aura plus qu’à demander l’autorisation du changement de nom auprès de l’officier de l’état civil dépositaire de son acte de naissance. Toutefois, il devra justifier de son changement de nom à l’étranger.
S’il accepte la demande, la décision de changement de nom sera inscrite sur le registre de l’état civil.
En cas de refus, il devra saisir le procureur de la République et informer le demandeur de sa saisine.
Saisi dans les mêmes conditions, le procureur de la République du lieu de naissance peut ordonner lui-même le changement de nom.
Une fois acquis, le changement de nom s'étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire lorsqu'ils ont moins de treize ans.
La décision de changement de nom acquise à l'étranger est portée en marge des actes de l'état civil sur instructions du procureur de la République.
En cas de refus ou d’opposition du procureur de la République, l’intéressé devra saisir le tribunal de grande instance compétent.
Quid des autres demandes de changement de nom ?
Il existe de nombreuses autres situations qui entrent encore dans le champ d’application de l’article 61 du code civil :
- La demande de changement de nom pour des motifs d’ordre personnel (intérêt légitime) : demande d’harmonisation du nom pour tous les membres d’une même famille ; demande d’obtention du nom d’un parent de préférence ; demande de reconnaissance de la possession d’état du nom de famille porté pendant plusieurs années de manière constante et prolongée, notamment sur ces documents d’identité et administratif (CNI, Passeport, Carte d’électeur etc.) ; demande d’obtention du nom d’usage ; demande relative à des circonstances exceptionnelles etc. ;
- La demande de relèvement du nom en voie d’extinction ou en francisation.
Pour ces situations, la procédure reste inchangée.
En application de l’article 61 du code civil, « toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom.
La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré.
Le changement de nom est autorisé par décret. »
Cet article est issu de la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relative à l'état civil, à la famille et aux droits de l'enfant et instituant le juge aux affaires matrimoniales. Le changement de nom est, dans tous les cas, autorisé par décret simple (V. Sur la nécessité d’accélérer et de simplifier la procédure V. Rapport n° 76 (1992-1993) de M. Luc DEJOIE, fait au nom de la commission des lois, déposé le 2 décembre 1992 – Une simplification et une accélération de la procédure qui n’ont pas eu les effets escomptés en pratique).Le décret n° 94-52 du 20 janvier 1994 relatif à la procédure de changement de nom fixe les modalités de dépôt de la demande de changement de nom.
La demande est adressée au garde des Sceaux.
Elle est précédée d’une publication au Journal officiel de la République française d'une insertion comportant son identité, son adresse et, le cas échéant, celles de ses enfants mineurs concernés, et le ou les noms sollicités. Si l’intéressé demeure en France, une publication est, en outre, effectuée dans un journal désigné pour les annonces légales de l'arrondissement où il réside.
L'autorisation ou le refus de changement de nom ne peut intervenir que deux mois après la date à laquelle il a été procédé aux formalités de publicité.
Le garde des Sceaux instruit la demande. A cette fin, il peut demander au procureur de la République près le tribunal de grande instance du lieu de résidence de l'intéressé ou, si celui-ci demeure à l'étranger, à l'agent diplomatique ou consulaire territorialement compétent de procéder à une enquête. Il recueille, le cas échéant, l'avis du Conseil d'Etat.
L’article 6 du décret précise que le refus de changement de nom est motivé. Le pouvoir de l’administration en la matière n’est pas discrétionnaire. Le refus doit être motivé par l’absence d’ « intérêt légitime » au sens de l’article 61 du code civil. Il est notifié au demandeur par le garde des Sceaux.
Un recours gracieux est possible. Il conviendra de l’adresser au garde des Sceaux. Il est important d’y inclure des éléments nouveaux ou de l’informer de nouvelles difficultés résultant du refus du changement de nom. Ces éléments paraissent indispensables pour convaincre le garde des Sceaux de revenir sur sa décision.
Le pouvoir de l’administration s’exerce aussi sous le contrôle du juge administratif. Un recours contentieux est ouvert dans les deux mois à compter de la date de la notification de la décision. La juridiction compétente est le tribunal administratif de Paris.
Le délai anormalement long de réponse du Garde des Sceaux
Les délais de traitement des dossiers de changement de nom par les services du garde des Sceaux restent anormalement long : entre 3 à 4 années pour obtenir une réponse (Sur l’atteinte au droit à un procès équitable – article 6 alinéa 1 de la Convention ESDHLF – Cour EDH, 17 juin 2013, Mustafa c. France, Req. n° 63056/00 : Condamnation de la France car la cause de l’intéressé n’avait pas été entendue dans « un délai raisonnable »).
Alors, est-ce une véritable simplification de la procédure ?
Ces nouvelles dispositions concernent uniquement le contentieux relatif au changement de nom interétatique (cas des binationaux). Cette situation ne constitue pas la majorité de requête en changement de nom.
Il est à craindre, sauf à bénéficier de cette nouvelle procédure, que les délais d’attente de traitement des dossiers restent inchangés.